Madrid, 2-2-04

COMME LA NEIGE

Comme la neige sur des rochers gris
terre devenue montagne
blanchit le paysage
et attrape le regard
dirigeant tes pas
vers le haut,
laisse les mots
orienter ton destin,
ne regardant en arrière que l’indispensable.

MONTSERRAT ROVIRA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 3-2-04

TOUT TREMBLE

Tout tremble.
Un volcan glacé
sent de nouveau en son sein,
l’épais chatouillement
de milles langues de feu,
cognant pour atteindre le ciel.

Les hauteurs se fêlent.
Le bruit assourdissant
de tant de force contenue
a craché ses pierres déchirées,
son magma incandescent,
effaçant toutes les traces.
Il criait impunément, seulement Destruction
Destruction et Mort.
Je me suis dit :
ce n’est pas bien de construire une maison
sur les cendres.

OLGA DE LUCIA VICENTE
École de Poésie Grupo Cero
Atelier samedis 19h Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 4-2-04

QUAND J’ÉCRIS...

Quand j’écris les montres se brisent
et le temps tourne, sans arrêt,
autour de mon crayon
sur cette blanche surface.
Quand j’écris le temps s’arrête
se consume en images:
ce que j’ai été, et que je suis maintenant
dans ce monde de mots.
Ce qui a été dit et ce qui n’a pas été dit,
le verbe incarné dans un corps
qui n’existe pas.

Je joue cette peau,
cette rime dissonante,
ce verbe vraiment à moi
ce bleu qui arrive jusqu’à la lumière,
orange, arbre,
des dieux brisant  le crépuscule de l’amour.
Hommes et Femmes
Elle, moi, lui.
Qui ?
Qui suis-je maintenant
que le mot
ne m’abandonne jamais ?
Qui étais-je
quand j’incarnais tous les hier ?
La prophétie
doit s’accomplir :
« Tu viens de la poussière, ont-ils dit,
et à la poussière tu retourneras… »

ALEJANDRA MADORMO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Vendredi 11.30 Buenos Aires
Coordinatrice: Norma Menassa  


Madrid, 5-2-04

  AU RYTHME DE TA VOIX

Poète laboureur, ta fine trame
s’enfonce dans l’épaisseur luxurieuse
du verbe, et c’est ta chair tremblante
mère et chanson de cette ville qui clame:
 
Arrêtez la guerre! Et il revient au rêve
en pénitente soumission d’ailes.
Arrêtez la mort ! Vos langues clairsemées
assises d’anesthésiques rêveries.
 
Poète germinal, ta voix magnanime
colore cette ville aveuglée,
mon cœur recommence à battre, épuisé

le mot femme a été construit
dans ton déploiement ludique et multinanime.
Au rythme de ta voix, je danse ma vie.

PAULA MALUGANI
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 19h Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 6-2-04

VOLER DE SES PROPRES AILES

Tes yeux verts gardaient la vie,
fictions perdues, se retournaient contre le temps.
Tu disparaissais dans des inconséquences,
des bévues de l’attente.

Moi, je te parlais,
j’écoutais en toi un cœur aux yeux nus,
allongé sur l’avenir d’une immense
plage déserte.

Instant de métamorphose,
en chansons que les eaux unissent
en routes signalisées par des oiseaux marins.  

Je te dis, ma chérie,
les légendes sont des sons pour notre désir,
des brassées qui atteignent quelques cimes du soleil.  

Tu devrais voler de tes propres ailes,
alléger l’amour que forge le futur
et de brouillards déchirés
avec la force primitive des embarcadères
avoir pied sur la terre.

Jaime Icho Kozak
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Dimances 11h Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 9-2-04

BELLE-DE-JOUR

Des belles-de-jour serpentent
montent sinueuses
entre les murs médiévaux
sauvant les trous
que des érosions implacables
engendrent posément.
Elles grandissent en compagnie
de jaunes lichens
pressées
sur le chemin de la lumière
aveugles et obéissantes
au puissant éclat.
Elles rêvent de léviter
de s’arrêter pour regarder
au-dessus d’elles-mêmes.
Butiner un fragment de vertige
vaincre la vieille peur
qui leur ordonne
de se traîner sans fin.
Une belle-de-jour
qui veut être oiseau
fréquenter le vent
regarder en face le soleil.

MARISA RODEZ PUEYO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 10-2-04

SÉLECTION

Je perce le tas de brique
comme si je cherchais des pierres précieuses.
Mais dans cette cour
douilles et silence
me font suer abondamment.

Je tape les lettres
comme si je cherchais un destin.
Dans ce temps vif
où je gaspille tout
je n’aime personne,
et ils me font travailler mes décisions.

La vérité ne m’a jamais été sincère.
Quand j’ai cru éclater
au milieu de la bataille
traversé par un missile,
ou quand j’ai cru défaire
ce filet de vers qui m’emprisonnait
dans ma chambre solitaire.

KEPA RÍOS ALDAY
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego  


Madrid, 11-2-04

JE RÉPARTIS TON VENTRE

Je répartis ton ventre
dans une tragédie grecque
voyageant de Thèbes à Colonne,
de Vénus à Vulcain.
Je me plonge dans la coupe de vin empoisonnée
vêtue de liqueur amère
sans tombe.
Ton ventre s’offre comme un jardin fleuri.
Je promène mes mains
dans ton obscure chevelure
et je t’offre ce que je ne suis pas
pour recommencer.  

MÓNICA LÓPEZ BORDÓN
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Dimanches 17h Alcalá de Henares
Coordinateur: Carlos Fernández del Ganso  


Madrid, 12-2-04

LE TORSE

D’aveugles fantasmes
effaçaient leurs traces
intentionnellement.

Et, cependant,
ils continuaient à marcher
vers le torse
nu de la nuit.

La peau amortie
perdue entre ces mains
la nuit se promenait
suspendue dans les marasmes.

Une conjonction
lunes et marées,
attraction déformée,
lançait contre moi
une lumière grise et argentée.

Mª ROSA PUCHOL PÉREZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 13-2-04

AVEC DE LA BOUE SUR LES CHAUSSURES

La boue m’accompagne
avec sa mollesse coquine
se laisse mouler,
consent aux changements…

Et même si elle prend du retard
elle est toujours
trace, moteur
plume
au repos
d’un nouvel homme.

Parce que la pierre est sobre, immobile
Pierre-Homme
toujours fière.
Mais la boue pulse, invente
se tourmente doucement
c’est l’éclair exact d’une vie !

Avec des lèvres de boue
aux yeux de lait
nous sommes venus
insister dans le bois qui change.

SERGIO APARICIO ERROZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 16-2-04

ÉTINCELLE DE METAL

Elle, elle est la réalité,
un reflet du fantasme,
un préambule de la mort,
un danger d’eau vive.

Son corps se reflète dans les miroirs,
ses hanches sonnent
et nue dans la nuit
elle demande des désirs à la lune.

Une tristesse solitaire
un cœur abandonné,
fugace liberté,
entourée de souffles de vie.

Elle frappe avec l’étincelle de métal
le déguisement, pour la prochaine condamnation.  

C. CRISTINA FERNÁNDEZ ARGUDO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 15h15 Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 17-2-04

MOTS

Les hommes sont faits de boue,
je les ai vus.
Je les ai vus sécher et se briser
en mille morceaux.
Je les ai vus s’enfoncer dans la terre de l’enfer
à mille degrés de température : fondus,
liquéfiés, évaporés.
Je les ai vus debout, inertes, massifs, attendant
les pluies d’avril ou le soleil d’août pour disparaître.
Je les ai vus morts et
aussi vivants,
la seule différence entre eux
furent les mots.

LUIS RODRÍGUEZ HERNÁNDEZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 15h15 Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 18-2-04

LE TRIO

Arrêté après avoir jeter une femme par la fenêtre et s’être échapper
                                    Métro direct, 24 octobre 2003

Des corps de l’encore
conservent l’odeur et le murmure
de larves dans les champs
de coton endormis.

Trot chimérique de chiens sauvages
vaguant à la dérive des bancs publics.
Nous trinquons un lit en morceaux
imprégnés par la torpeur
de mort des désinfectants.

Dès l’aube un concert
de toux sèche et de bronchite étouffait
les semelles du policier dans les couloirs
disposé à nous dissoudre en grumeaux
avec la simple force du regard.

Internés dans une cellule loin de la mer
la ville nous apparaît
un vertige de maison sans destin,
une galopade de gouttières,
de clôtures, d’aiguilles d’église
et de rues, les tripes dont les égouts
exposent les oeuvres municipales
sous le ciel infesté de pustules de nuages.

Au milieu de tant d’odieuse clarté,
Moi, ton mendiant, toi, ma défunte,
et le flic, assommés par la lumière
dépouillés de la miséricorde
de nos propres ombres.

ROSA GARCÍA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 15h15 Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego    


Madrid, 19-2-04

LE TORSE

Tour mutilée.

Regards manifestes
se superposant au majestueux halo,
que tirent tes non mains,
tes non lèvres,
tes non jambes,
ta sans tête.

Fouetté de tous les côtés
tu signifies encore.
Trace sans empreinte d’un avenir.

Et cependant les siècles
t’ont lancé comme un présent,
ancien,
jusqu’à l’instant même
où je te nomme.

SANTIAGO DE MIGUEL
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Mercredi 19h45 Madrid
Coordinatrice: Paola Duchên


Madrid, 20-2-04

ESQUILLES DE SOLEIL

Tu te vides dans les mots
conjurant la peur
à un hier vertigineux
d’obscures intentions.

Tu retires le regard impossible
d’un intérieur inexistant
pour suivre le sillage
du tisseur de tes rêves.

Tu sèmes sur la peau nue
des esquilles de soleil
créant une trace de lumière
navigation de poètes perdus.

NATALIA BLASCO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Mercredi 19h45 Madrid
Coordinatrice: Paola Duchên


Madrid, 23-2-04

DÉTOURNANT LE REGARD

Comme une magie amoureuse de la nuit
je secoue de mes cendres des gris amassés
des rébellions magiques arrivent
je tremble de soif en me regardant dans tes yeux.

J’ai fouillé avec mes mains
dans les entrailles du temps.
J’ai payé avec le tribut stipulé
je dois quelque chose, je ne demande rien.

Aujourd’hui je danse cette danse de couleurs sauvages
à l’oreille du temps.
Marquée au feu je porte
une rose d’épines.

J’irai à la rencontre du son.
Parle-moi comme si tu ne savais rien.
Reconnais-moi femme dans un poème
file ton regard à mon regard.

C’est l’âge du sentier
chargé de feuille d’automne
je ne détourne pas le regard
il est inverse dans l’explosion de la couleur.

CARMEN ORTIGOSA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Dimanches 17h Alcalá de Henares
Coordinateur: Carlos Fernández del Ganso


Madrid, 24-2-04

JE TE MANGERAIS LE CŒUR

Ici, ce puits sans fond qu’est
mon estomac brame pour toi, mon amour.
Il y a des nuits, des toujours, des encores
où je te mangerais le cœur…
Nuits où la faim dévore
mes entrailles.
Mon âme n’a pas de doigts pour compter
tes sourires, ni tes insolences.
Ce sont des semaines entières
où je m’enferme avec les livres
et je dévore sans trêve les feuilles de papier,
et je me laisse habiter par des vers, par des baisers,
et dans ma chambre nous sommes trois cent faisant
de l’amour un bûcher infini
pour illuminer un verbe.
Ce sont des mois de quarante jours où j’attache
une couleur à ma ceinture
et je tourne, je tourne, je tourne sur la toile,
qui cède à la danse sa blancheur
comme une fleur ses seins
à la rosée…
Et il y a des nuits, des années, des temps
où la plume vainc toute fatigue.
Les larmes d’encre coûtent rien,
les amours d’encre demandent rien,
les délires d’encre sont un poème…
Et moi, mon amour, je te mangerais,
assise sur cette faim sans frontières,
je te mangerais le cœur…

ALEJANDRA MENASSA DE LUCIA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 19h Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 25-2-04

DERRIÈRE

Derrière est resté le malaise idéal,
le silencieux fracas de la plainte.
Face aux archétypes détrônés
d’éternité, il a fallu être d’autres,
solitaires devant le dégoût,
dévots de la somme immémoriale.
D’acides mesures de folie,
défiantes face à la loi universel,
ont été débroussaillées du chemin
par la force de notre voix.

Derrière gisent, définitivement écrits
de vieux déguisements de femme.

Carmen SalAmanca Gallego
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 19h Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 26-2-04

REVENIR AUX DÉBUTS

Revenir aux débuts
écrire une lettre et ensuite une autre
et croire que la vie est là.

Dessiner de mes mains des colombes incendiées
des vases japonais verts d’avant la guerre
une parmi tant d’autres ou peut-être croire que dieu vit sur une terre
où le ciel est plus haut que d’autres ciels
et les spores de la mer ouvrent leurs orifices
pour s’emmêler dans les miroirs de l’après-midi et dormir.

Des villes sont tombées et des pays qui croyaient en l’homme libre,
des livres de tous les âges circulent sur les réseaux audiovisuels
et mon coeur est un fil de métal attaché au manche d’un balais.

Écoute son bruit abrégé
ce battement de bord excrémentiel
ce mot fait de couleur.

CRUZ GONZÁLEZ CARDEÑOSA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier samedis 17h Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 27-2-04

SUR LE POINT DE VOLER

Dessin vertébré sous les pieds
pas froids de neige pour les jours
lieux humides où les vagues n’arrivent pas
et tes mains tissant une écharpe aux longs cheveux
sur les écarts de la nuit.

Réfugiée derrière l’ombre
je suis la chute du soleil, des mots obscurs
se balançant distraits par la pluie,
goutte jusqu’à la prochaine aurore.  

Arête détachée d’une étoile
je soumets le corps au vol libre,
ni sol, ni choc, ni épée,
ni peur qui désire en silence
un monde où m’enfoncer
boue et eaux profondes,
astuce du grand.

Sur le point de voler quelque idée de plomb,
je lis en cachette des dieux
aux sourcils froncés qui habitent la cloaque,
avant qu’ils interdisent la lumière aux yeux inquiets,
qui cherchent désespérés un autre mot,
un mot, entre le monde et le néant.

MAGDALENA SALAMANCA GALLEGO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Selección de Poemas Inéditos

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