Madrid, 4-11-02

FEMME

Une femme qui vole, a des jambes de sel
ses tendons la suivent, l’embrassent, rôdent autour d’elle.
Dans ce vol la jungle chante ses mets exquis
la rêverie se dispose en grappe, elle pâlit toute maladresse.

Une femme, les jambes regardant le toit
offrant sa vie, comme une nèfle odorante, désirée.
La mer, vestige présent, chante ivre de plaisir.
Ceinture en une rime de nuit, elle marque.

STELLA CINO NÚÑEZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du dimanche à 11
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 5-11-02

SI JE N’ÉTAIS PAS LÀ

Si je n’étais pas là, où serais-je?

Dans une quiétude prétérite,
le regard perdu dans les banlieues de ta nuit,
sors de la rencontre attrape les après-midi sombres.

Prisonnière du silence, déclinant
dans les draps blancs du calme,
j’ai trébuché sur des coins si obscurs, si obscurs…

ANA MARÍA BARLETTA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 19h. Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 6-11-02

DONNE-MOI TA MAIN...

Secrète recherche
            lignes de feu et
de musiques
espace invisible
         ton mystère.
           Je me trouve dans la portion de Terre
           dans laquelle je vibre
                    sur les tambours de sang
                         de tout mon peuple.
Les doigts couverts de ma propre boue
           je défigure des gouttes ocres
                   et dans les fissures les plus fructifères
                                                           je perds mon sang.

 CARMEN PRESOTTO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier de Portoalegre
Coordinatrice: Marcela Villavella


Madrid, 7-11-02

  AIMER L’OUBLI

Aimer l’oubli comme le souvenir,
Tous deux mentent avec la même passion.
Ce baiser que ma mémoire s’obstine à me refuser,
Cet adieu qui n’arrête pas de marcher avec moi.

Cette robe te rend douce, proche de ta peau
Sa couleur m’est indéfinie.
Ce regard à toi me dissout
Comme le sucre dans l’obscur café.

L’amour s’engloutit avec le temps
Mais avec la laxité d’un après-midi en retraite.
Mais dans le profond de la nuit il revient
Réclamer sa place retardé.

Aimer autant l’oubli que le souvenir
Est devenu une consigne dans ma vie.
Je t’aime encore pour ta constante absence
Je t’oublie encore souffrant ta présence.

ROBERTO MOLERO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Vendredi 11,30 h. Buenos Aires
Coordinatrice: Norma Menassa


Madrid, 8-11-02

ANTI-CHANT À L’ESPOIR

Dites-moi de quelle couleur est l’espoir,
vert non, je le sais, parce que
je ne l’ai jamais vu avec les yeux…
Ceux qui ont de l’espoir meurent jeunes.
La lumière, messieurs, regardez vos mains
et vous verrez la lumière, il n’y a aucune lumière
au fond de ce tunnel.

Ceux qui espèrent, ne tendent pas de filets.
Demain ils aimeront, d’autres aimeront.
Demain ils vivront, d’autres le feront.

Il y a des antidotes contre l’espoir:
chausser l’uniforme et se mettre au travail,
offrir les rêves à la nuit,
aimer avec frénésie tout ce qui grandit.

Aujourd’hui une main se lève contre l’injustice,
aujourd’hui un amant n’attend pas d’être aimer,
aujourd’hui un homme tend à un autre la main,
et il y en a des centaines qui tissent
sur des papiers écrits la distance.

Aujourd’hui, c’est aujourd’hui, et demain…
il n’y en aura que pour ceux qui ont laissé
de côté l’espoir.

ALEJANDRA MENASSA DE LUCIA
École de Poesía Grupo Cero
Atelier Samedis 19 h. Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 11-11-02

 RÉVEILLÉE

Réveillée,
je devais être réveillée.

Ouvre les yeux, me disait-elle,
contiens la haine, ne permets pas
qu’elle se dilue en larmes.
Elle doit éclater entre tes doigts.

Efface les tremblements de la voix,
rampe sans éloquence
ne te livre pas
des bêtes sévères guettent
sur la limite de la rancune,
ta chute.

Les fantômes ressuscitent,
le chœur de l’église crache
des cris de ma mère morte
et moi, je ne peux pas fermer les yeux.
Mes bras enterrés craquent,
le brouillard est inaltérable
et rien n’équilibre le pardon.

Sois vigilante
tu dois être réveillée,
maudite, oui, mais réveillée.

Carmen SalAmanca Gallego
École de Poesía Grupo Cero
Atelier Samedi 19 h. Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 12-11-02

UN DESTIN

Lumières et ombres font ton chemin,
Lettre sans cap, survenue.

Mains de boue pour pétrir
la peau de ton nom.

Du silence de ta voix
le temps courbe l’horizon
dessine un corps, un destin.

CRUZ GONZÁLEZ CARDEÑOSA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17 h.
Madrid
Coordinatrice: Carmen SalamancaGallego


Madrid, 13-11-02

UN MOT DE DEUX SYLLABES

Je ne peux pas faire un pas de plus
sans me réfugier dans cet espace;
râle de grandeur condensée
limite de cris sans scandale
syllabe perdue en deux dimensions
qui se cache sauvagement
derrière le blanc de cette page.

Un mot et ton nom
prend son vol
paradigmatique de l’écriture:
digues en solitude
où ils n’existent pas de dires esclaves,
phrases engainées
accords sans lumières
désirs enchaînés.

Terme invisible pour mes yeux,
carmin amoureux permanent,
guerre de sexes se libérant
des ruines de la raison.

Il n’y a pas de volontés,
seul des illusions féroces
démontrant la misérable astuce,
chaque principe tourmenté
tissé dans l’aveuglement,
profondeur inaccessible
dressée devant moi.

MAGDALENA SALAMANCA GALLEGO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17 hrs. Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 14-11-02

ENTRE LES CRINIÈRES

Je traverse la nuit et derrière la montagne
l’éclair annonce ton corps.

La lumière désire être chair et tonitruante présence.
Mais toi, tu maintiens ta position silencieuse
comme une feuille ancrée dans le temps,
et ni la peur ni la faim ne me font bouger.

Tu agites les bras pour dégager la folie
de tes doigts.

Mettre un mot dans l’air
qu’il tourne sur la terre, qu’il se touche lui-même.

La vision d’une fleur anéantie par la passion
de la brise te fend le cœur.
Je palpe les murs qui existent derrière la montagne
et je ne te parle pas de voix au cas où tu fuirais
ou que tu t’assoies pour te reposer avec les chevaux
entre leurs crinières de rêves.

Tes yeux sont mouillés d’images.
Tu prononces la fleur et nous sentons le pétale
comme un corps mutilé, encore chaud,
et le sang jaillir avec insistance
de la source d’envols.  

Tu es un épi capable d’alimenter le monde.
Je m’évade de l’horizon.
Ton nom galope lentement
                                    sur mes yeux.

Andrés González Andino
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17 hrs. Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 15-11-02

  QUE DEMANDES-TU?

Ton bras, matière presque humaine est-il
la cause de tous les mystères
          de ce que tu appelles POÉSIE?

La séquence de la sagesse de ton bras, n’est-elle rien d’autre qu’une prolongation,
l’excès des liens que tu as avec la lumière?

Est-ce toi
            quand tu reviens et tu ne t’es pas encore donné de nom?

Est-ce là où tu arrives en volant,
ce qui disparaît et ne s’en va pas,
ce qui a ce bord de rivière
et est-ce salive
            ou inutilement rien?

Est-ce une rage verte
ou est-ce l’enfer pour mourir d’amour?

Je veux que tes yeux cessent de divaguer dans le jardin,
que tes yeux cessent de divaguer pour tout,
que tu ne sépares pas l’air avec les mains
                                                ces emmurées.

Use le temps comme s’il allait se diviser en parlant
comme si le temps vivait déjà en toi
    guetté
dans la légèreté des minutes,
use le temps.

Parce que si j’apporte des mains à l’ombre et tu me laisses
c’est le visage de toutes les choses qui tombe.

Et tout frémit
et tout s’incline
et le profond revient
et je n’ai pas de terre avec laquelle te terminer
et tout est le visage des choses qui tombe
comme une tache qui n’arrête pas de s’écrouler.

Use l’air et le temps,
dispose tout contre un final de fins séculaires,
use l’air comme un bord,
use ton nom qui revient et se courbe et traîne la nuit
et dispose de formes et de choses et crie.

Use ton nom pour revenir
maintenant que je n’ai plus aucun lien avec la langue
                                    dans son métier de bateau.

Maintenant le noir a une forme
et il s’appelle ton âge

c’est un cheveu, un cheveu infini qui crie
depuis le lointain.

PILAR GARCÍA PUERTA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17 hrs
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego
 


Madrid, 18-11-02

QUELLE GRANDEUR, QUELLE SOLITUDE!

Quelle grandeur, quelle solitude!
Celle de l’homme, dans certains projets.

Quelle grandeur, ses cheveux
attachés au ciel
attachés sans épines, à la vie!

Quelle solitude son visage
plein de mains et d’épouvante
couvrant concave les jours
comme l’eau dans le désert !

Quelle grandeur, quelle solitude!
Celle de l’homme
illuminé par un seul soleil
et son cortège d’étoiles.

Minuscule et substantif
il saute clôtures et drapeaux
de couleur, d’humour, de sang
un nœud qui l’invente.

Quelle solitude, quelle grandeur!
celle du poète, enfant et vertige
ombre et peau respirant ensemble.

CARLOS FERNÁNDEZ DEL GANSO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 19hrs
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 19-11-02

MOT DE DEUX SYLLABES

C’est un piège au temps, c’est tomber
dans les bras du néant, une saveur
de cerises et de menthe. Imprononçable
sans vivre l’oubli, sans faire briller
les jouets rouillés, sans penser
au nom d’une histoire. Un
mot de deux syllabes met le
cœur à l’abri, les tempes
aigre douces, la montre au point mort
Il ne s’agit pas de sons lugubres ou
de chants pompeux. C’est la vie
et sa circonstance, le perdu et
l’aimé, une insistance inaccessible.

CONCEPCIÓN OSORIO CHINCHÓN
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h. Madrid
 Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego 


Madrid, 20-11-02

À COEUR OUVERT

Jardin assombri par la chute des jours
tu portes des condoléances de feu entre les lèvres.

Sous ta peau muette
des vers
des gouttes de sang sur le sable.

Claire Deloupy
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du samedi à 19h.Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa 


Madrid, 21-11-02

LE DERNIER SOLEIL

Dans ta voix étendue sur le matin, tremble
le dernier éclat d’un soleil distillé
dans la nuit infinie des cieux.

Ce n’est pas pour moi sa consolation
ce n’est pas pour mes lèvres son baiser définitif.

Je suis l’invité de l’ombre et du silence.
J’attends, cependant, comme une racine affamée,
comme un atome de fer écrit dans le magma de la terre
la résurrection destinée à ce qui n’est pas encore mort,
les paupières assoiffées palpitent,
le cœur plein de prières
et les mains qui n’ont pas encore goûté
l’or de l’épi.

RUY HENRÍQUEZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17 h. Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 22-11-02

LE DERNIER SOLEIL

Ce sera le tumulte d’une jungle
peuplée par des ailes infinies écrasées;
lumières et ombres
habitent l’énigmatique tranquillité de ton sourire
alors que le monde tourne rapidement
et tes lèvres embrassent une nouvelle promesse,
celui-là ne sera pas le dernier soleil.

EVA MÉNDEZ HERRANZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 25-11-02

ANGES INCERTAINS

Des anges incertains incendiaient mes veines.
D’inutiles superficies cherchant avec frénésie les impossibles.
Des cœurs sauvages illuminant des ombres.

Oh majesté!
pèlerin de l’inconnu
je n’attends que le Poème.

LUCIA SERRANO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Dimanches 11h Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa
Du livre inédit “Masques”


Madrid, 26-11-02

JE POURRAIS TE DEMANDER

Je pourrais te demander
un souffle vivant
une lumière éprise d’amour
une lettre, une lettre concave
pour tomber dans ton nom.

Perdre tout mon sang, si ce sang
fleurissait dans tes mains
regards sacrés
te cherchant définitive.

Mais le silence frappe
retarde sa fermeture brutale
lèvre de retour.

Verbe de mains pleines
dans son invisible prouesse
il grave des mémoires sans miroir.

J’énumère des lieux et des instants
des pas de syllabe,
en comprenant la nudité du mot
son déploiement glissant.

CLÉMENCE LOONIS
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h. Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 27-11-02 

C’ÉTAIT LE DÉBUT DE TOUT PRINTEMPS

C’était le début de tout printemps,
la noble obscurité de l’herbe te méritait,
un air insatiable
submergé comme moi
dans le fond du noir
te nommait.

C’étaient des nuits terrestres,
le tissu maritime des rêves
débordait de gestes anciens
de chevelures endormies
entre les mains prodigues
de mères.