Madrid, 2-12-02

MA VIE, LES CHEMINS

Les jours passent, ils passent comme dans un vol,
pas un vol de condor majestueu
pas avec cette beauté, cette suffisance.
Tout passe léger, véloce, insaisissable.
Le livre ouvert et celui qui attend en silence,
un plat de nourriture, les dents de lait, les factures impayées
ta voix au téléphone, un facteur, les cartes
le vert des arbres, cette nuit et cette aurore,
l’ambulance, le pêché, les prières.
Et tout passe et je passe et je ne peux m’arrêter sur rien.
J’adhère comme de la mousse aux rugosités de cette heure même
de vie qui ne revient pas et je glisse,
irrémédiablement je glisse sur cette pente et tombe sur une autre heure,
pour changer de vêtement, de religion, d’amours
de lectures, de lassitude, de nostalgie.
Et tout passe et je passe et je ne peux m’arrêter sur rien.
Le temps qui roule de son enfance se termine,
même les pierres passent, voyageuses
et les trains, les fleuves, la musique lointaine,
les semailles, la récolte.
La jeunesse s’échappe comme une colombe blessée.
Personne n’est jamais resté nul part,
personne ne vieillit étendu face à la mer.
Personne ne se voit grandir.
Et tout passe et je passe.
Ma vie, les chemins.

INÉS BARRIO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Viernes 11.30 h.
Buenos Aires
Coordinatrice: Norma Menassa


Madrid, 3-12-02

IL NE L’A PAS DIT

D’une nuit d’hypothétique hauteur
mon cri devient caïman de victoire,
constellation en fugue d’aveugles saphirs.
Un silence comme de dernier lignage
ferme des ponts étroits.
Pure obscurité tressée
sur de gigantesques cathédrales
et sortilèges de toile dansant
calmes vers la lumière,
réconcilient mon esprit
avec des avatars endiablés.
J’attache mes mains au futur
et bien qu’il ne l’ait pas dit
j’écris tout doucement ce poème
qui immortalisera ton adieu.

FERNANDO ÁMEZ MIÑA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier: Samedi: 17 h.
Coordinateur: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 4-12-02

IL NE L’A PAS DIT

Le jour ne s’est pas encore levé sur tes lèvres
cependant, la pluie cristallisée
a taillé cette possibilité contradictoire
de ton nom répandu en logarithmes.

Grappes de contretemps, pénombre
d’instants, ton visage revient
il monte dans la nuit et s’étend
parmi mes rêves, alors que,
marche à marche
la nuit répand son délire
sa fièvre de jardins
son habitude d’équinoxes
de larges avenues vers la mer.

Cette fuite de l’âme
lâche les vertèbres
et pleure des labyrinthes comme de fragiles
rafales d’un amour
qui ne s’est pas encore dit.

PAOLA DUCHÊN REYNAGA
Escuela de Poesía Grupo Cero
Taller Sábados 19 h. Madrid
Coordinador: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 5-12-02 

LE BONHEUR

Des jeux, fatal le bonheur apparaissait derrière des masques d’épouvante
elle, acharnée, tombait aux portes des lieux aimés
des grandes espérances mise au point sans souffrances attendues
mais transformées en fêtes officieuses de prodigues futurs.

Le bonheur apparaissait en instants arrogants ou disparaissait
dans de lucides moments d’alarme sur les passagers
du train qui grinçait sur le fer des rails
jetaient des étincelles qui faisaient des cendres invisibles répandues
sur des dormeurs de bois d’ébène taillée en forme de l’humain.

Le bonheur jouait sa partie de forme imprévisible
sur la volonté tendancieuse du bourreau qui menaçait
derrière l’uniforme avec des lois pharmaceutiques
humiliant la complétude de l’insensible
qui fonctionnait seul sans se faire sentir dans des équations de soupirs
et des battements avec des cycles inouïs qui obéissaient à l’automate.

Le bonheur apparaissait ayant peur de se faire voir par qui le rejetait
avec des formes brisées qui assumaient le déguisement nécessaire,
et noir de soutanes qui cachaient sa turbulence entre les murmures
des prières d’agonie de six heures de l’après-midi
et des chapelets de perles inclinées sur des confessionnaux apathiques
où tombaient involontairement des passions à l’odeur de pêché.

Le bonheur s’habillait en pauvre et vagabondait seul dans les rues
de l’enfance, où le cri perdait la honte et l’appel
à la corde légiférait l’après-midi
alors que les parenthèses enfermaient des angoisses
de ne pas savoir grandir, de ne pas savoir l’énigme
et de savoir la simplicité du précepte qui ordonnait de vivre
dans le joyeux vacarme du sexe des anges.

Fatal, en solitaire il joue à cache-cache et disparaît entre les arbres
où la position du corps se joint à leur ombre
pour répéter des fictions métaphysiques confondant la recherche,
assombrissant l’événement,
ce crépuscule peut-être où tourne le rideau
s’évanouit en malheur.

NORMA MENASSA
Escuela de Poesía Grupo Cero
Taller Sábados 19h. Madrid
Coordinador: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 9-12-02

RÊVE MINÉRAL

Un jour s’ajoute
à la mémoire de mon sang.

Je cherche en vain.

Elle, elle gagne par assaut
la partie.
Elle soutient
entre des colonnes de peau
la déraison.

Elle aime de l’histoire
ce qui n’a pas été,
elle attend toujours la pente
jamais le courant calme
des jours quotidiens,
l’abîme du silence
la maladresse ou l’oubli.

Elle jaillit
de la fissure de l’âme
et garde, entre ses doigts,
de longs filaments de rêve minéral.

ALEJANDRA MADORMO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Vendredi 11,30 h. Buenos Aires
Coordinatrice: Norma Menassa  


Madrid, 10-12-02

JE VAIS ME DIVISER EN DEUX

Il y a une douleur de fond…
Les lumières de l’adieu dans le regard,
tes doigts
                        qui reviennent à mon rêve,
tes doigts
                        je dis
passagers assoiffés de mon corps.

Et aussi
            mes doigts
                                    enflammant,
la fumée
            croissante
                        de ton sexe.

Je parcours pas à pas
les plis du souvenir :
ta voix
            musique grave,
ta poitrine découverte,
la rue et la tristesse;
je suis
            ta chatte sans maître.
Je déambule
                        dans d’obliques ruelles
je te cherche et ne te trouve pas.

Je t’appelle
                        depuis le froid
de cette petite mort
de cette petite larme
                        sur mes lèvres noires.
Vide des fleurs
                        de tes baisers,
je vais les pieds nus
                                    douloureux
                                                et en silence.
Dans cet après-midi lent,
les chimères
                        sont restées dans l’ombre.
Il y a une douleur de fond,
je l’écris avec l’encre
                                    de mes veines.
Je me rends
                 devant les lettres de ton nom.
Je vais me diviser en deux,
                                    je t’embrasse jusqu’à la fin,
je me perds vers le poème.

PAULA MALUGANI
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 19h Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa 


Madrid, 11-12-02

TROUS NOIRS

Au réveil j’étais un autre.
Un rêve m’emmena hors des espaces connus.
Sur la terre, des villes et de luxurieuses végétations,
lançaient des colonnes d’écume au ciel vaporeux,
au trou noir des entrailles de l’univers.
Elles congelaient des cadavres de papillons et des amours distraits.
Des trous où finissait et commençait le cosmos.
Œil touristique de planètes d’un système solaire en extinction.
Le traversant il passait à des dimensions infinies,
dur métier de navigateur intersidéral.
Corps sans limites et sirènes du défi.
Voyage transversal au trou noir,
lumière noire où tout brille, à demi enterré,
germé en mousses et oiseaux aux ailes agrandies dans l’effort.
Sans horizon où fleurissent des ouvertures,
des routes inconnues qui ni ne montent ou ni ne descendent.
Vide de montagnes, envahissant des caves, humides,
des étoiles galeries, de ténébreuses voûtes en or,
vides, dans les détachements subits du néant.
Ville géante qui entraîne des sons de l’univers,
des alluvions de pierres lunaires,
de Mars à Jupiter, d’Orion à la Voie Lactée.
Tant d’aventure écrite, tant de règne dans des mers de souffre
et les anneaux de Saturne,
poussant certaines langueurs, certains mystères au son.

Jaime Icho Kozak
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du dimanche à 11h
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 12-12-02

L’ABSOLU IL FAUT LE CHERCHER  

Il y a un creux invisible
qui fracture le temps,

comme si la mer s’éloignait
                        du ciel
que s’ouvraient des horizons,
d’obscures planches dorées
tombant sur les épis
d’un champ illuminé,
perméable à la lumière,
à la poésie, en attendant 
un coucher de soleil
qui envahisse le monde.

PILAR NOUVILAS LARRAD
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du Samedi à  17h.
Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego  


Madrid, 13-12-02

POÈME UN

Hors de mes limites
un ancien poème a résonné dans mon chant
et le son, alouette ou rossignol
prairie aussi éclairée de calandres est resté suspendu.
Pour que je puisse moi aussi dans le silence
trouver ma musique et sa résonance
souffle muet des oiseaux
hébétés par le cruel soleil de l’été.
Et ainsi, lèvres scellées et ailes quiètes
j’ai commencé à attendre l’après-midi et sa fraîcheur
jusqu’à fondre ma voix avec la brise ténue des peupliers
convoquant des lumières vespérales…

MARÍA CHÉVEZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier dimanche: 11 h. Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa
De son prochain livre : «Veille du Temps »


Madrid, 16-12-02

VENT

Comme le vent,
Ravivant la flamme
Tu glisses tes mains dans ma vie
Incendiant chaque cellule.

Comme le vent,
suspendant le sable du désert
Tu soutiens ma vie entre tes bras
L’empêchant de tomber.

Comme le vent,
Qui danse avec les feuilles,
Danse impossible,
             Festival d’automne…
Ton sourire traverse ma vie.

Je m’éteins,
Je tombe,
J’arrête de danser
            Si toi, tu ne souffles pas.

JORGE FABIÁN MENASSA DE LUCIA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17.30. Madrid
Coordinatrice: Alejandra Menassa de Lucia.
De son prochain livre "Sur papier bon marché"
Second prix (ex-aequo) de Poésie Pablo Menassa de Lucia
dans sa quatrième édition.
*Les livres qui ont reçu un prix seront publiés en février 2003


Madrid, 17-12-02

POÈME

Tu es comme une après-midi d’automne:
un vent violent d’ocres
offerts par ta présence.
Un cyclone de rires puissants
navigateur d’amples espaces
à la recherche de la création.
Caisse de résonance
de mots percutants et passionnés,
tissés avec amour.

MARISA RODÉS PUEYO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h Madrid.
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 18-12-02

ELLE NE L’A PAS DIT

La forme de rêver change aussi.
J’ai une phrase sur la dernière aurore
dans laquelle la douleur me transperce
à la vitesse de la lumière
me laissant intact.
Je baille, je lance un défi à l’univers
elle reçoit ces signaux confus
et elle frémit.
Mon corps batifole dans le néant
comme sur un bûcher d’hérétiques,
mais au lieu de mourir
je me réveille: Mes dents
claquent dans le vide
irradiant une nervosité agréable,
une overdose cosmique je ne pourrais pas supporter.
Je n’insinue pas connaître les étoiles,
j’indique avec mon réveil
le jeu des jours.

KEPA RÍOS ALDAY
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du Samedi: 17 h. Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca  Gallego


Madrid, 19-12-02

OMBRES ERRANTES

           Nous avons marché comme des ombres errantes
Le soupir de l’intense mer est resté suspendu
                      dans les ténèbres.
                                       Pénombre de formes

Le silence a tout emporté
            La solitude
                        Comme des pleurs de pierre
                        il a revêtu le corps de mots.
                  façade vitreuse que celle de l’oubli.
Chrysanthèmes du cristal en bleu intense
Lettres d’amour qui se sont envolées
Bouches coupées en biais
Soldats sans bataille
Dans une nuit de couleurs
La lune regardait alors qu’un tir de feu
visait son âme.
La nuit s’en est allée
Et le jour s’est rempli de pleurs.

MÓNICA LÓPEZ BORDÓN
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Dimanches 17h.
Alcalá de Henares
Coordinateur: Carlos Fernánd
ez del Ganso 


Madrid, 20-12-02

COMME DEUX GÉANTS SE METTENT DANS MES MAINS

Comme deux géants se mettent dans mes mains,
ces gants qui ne sont pas à moi,
ou ce rêve qui est moi.

Je viens des murailles
désolées de vieilles lamentations,
cette raison qui me dupe
cette raison qui me culbute par une chute en arrière
ne sait rien de la logique qui conspire
contre la chair dans le formol,
de celle qui apportera à sa façon
une gorgée de réalité
pour nos yeux fatigués.

MANUEL MENASSA DE LUCIA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17,30 h. Madrid
Coordinatrice: Alejandra Menassa de Lucia
De son prochain livre "coups de réalité"
Second prix (ex-aequo) de Poésie Pablo Menassa de Lucia
dans sa quatrième édition.
*Les livres qui ont reçu un prix seront publiés en février 2003


Madrid, 23-12-02

LA MOITIÉ DE MA VOIX

La moitié de ma voix
est une avance soutenue:
implicant le vent,
entrant chaque matin
comme un épais brouillard
qui paralyserait les semblables.

J’arrache en cet instant
sa raison indomptable
mer blanche
écume diluée en ombre obscure.

La moitié de ma voix
sont ces mains vieillissant
à un rythme frénétique:
ondulante étreinte du destin.

C’est une roche indélébile
surgissant fragile de tes rêves,
dans cette mer inachevable,
dans cette douleur lointaine.

Mª ROSA PUCHOL PÉREZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h. Madrid
  Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 26-12-02

CHAPAPOTE

Je reviens sur la plage
pas celle-là ni cette autre;
celle de toujours, celle qui change.
Son petit sable me distrait
ensuite il me vole la somme
de grains et de vent.
Je marche, sentiers de rire
je trébuche sur l’émotion
je ramasse et je suis ramassé.

Ah, vivre le poids net des plages
sans lésiner sur le noir
vêtir les costumes violents et endormis
du sable
vivre le grain de sable, tout en relation.

Ne rien comprendre, ne rien comprendre.

Tout le littoral vécu est une tache
des jours perdus le forment
des jours encore à faire
tendresse d’huile et de mer.

Le laisser, ne pas s’inquiéter
l’océan rit dans l’obscur.

SERGIO APARICIO ERROZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h. Madrid
Coordinatrice: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 27-12-02

SUR LE FLEUVE

Sur le fleuve
on entend le cœur
se dédoubler et partir
nous emmener sur sa trace
jusqu’à convoquer le souvenir attendu.

Nous devenons alors autres
nous laissons derrière le soleil de la nostalgie
pour voir cet écoulement
routes ouvertes pour la circulation de l’amour
qui se fraient un chemin au milieu de la mort.

ELEONORA D'ALVIA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Encore. Buenos Aires
Coordinatrice: Lucía Serrano


Madrid, 30-12-02

POUR CONTINUER À VOYAGER

A Olga de Lucia

Pour continuer à voyager
j’achète ce billet de mots,
qui me transporte vers la poésie,
brodeuse de futur.

Je ne veux pas l’ennui dans mon vivre.
Les heures basses meurent
sur les pages d’un poème immortel.

Je choisis de continuer à voyager
sur ce coursier, indomptable, aveugle.
Une lutte entre la bête et la raison.
Une étreinte qui nous fondra pour toujours.

Je suis le fils d’un monde peuplé,
humain, d’êtres différents
Nous marchons dans la production
d’une existence possible.

HELENA TRUJILLO LUQUE
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 18h. Málaga
Coordinatrice: Amelia Díez Cuesta   


Madrid, 31-12-02

  JE NE SAIS PAS COMMENT S’EST ARRIVÉ

Je ne sais pas comment s’est arrivé,
et je ne le saurai jamais.
Le passage de tes jours
s’étendait, ferme,
à côté de la vie
en fermant sur chaque paupière
ton avide pupille.
Je ne sais pas comment s’est arrivé,
et je ne le saurai jamais.
Tu venais du coin juste
d’où vient le vent.
Le vent chaud du nord.
Le rouge printemps
et l’automne taciturne.
Tu as émoussé les matins,
tu as habité un tango dissonant,
et pour danser tes notes
j’ai mué derrière toi.
Et dans un coin quelconque des rêves,
j’ai violé tes serrures,
j’ai bu ta solitude,
j’ai ouvert mes veines dans de nouvelles traversées,
et j’ai délié de moi, l’une et l’autre
ma peau ornée,
de reine et de mendiante.

NORMA CIRULLI
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 19h Madrid
Coordinateur: Miguel Oscar Menassa 


Selección de Poemas Inéditos

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