Roule
la sphère sur le vert
elle n’a pas commencé seule son chemin,
avec elle roule le pied,
roule la force de l’athlétique
genou,
roule tout le corps incliné
vers l’avant, roulent
les pensées du joueur.
Elle
a été frappée par la force précise,
et elle est maintenant un bébé zèbre
fuyant de l’été torride.
Le
joueur la regarde,
sûr de son destin.
Le cœur du public
est un champ désolé,
après une bataille.
Il
a suspendu son battement, ou mieux encore,
il a transféré son battement
a ce rejeton de pingouin
qui dévore chaque brin d’herbe,
et
se dirige vers les bras
de cette mère qui l’aimera
d’une étreinte enveloppante.
Le
joueur, qui pense
à son négoce d’oranges au
Connecticut,
qui a caressé sa femme hier
avec la même main avec laquelle il prie maintenant.
Le
joueur, pour qui ce but
serait encore cent fois
plus agréable qu’un orgasme.
Le
joueur, qui paie les impôts,
et qui pleure parfois en lisant Paul Éluard,
le fête presque,
dans sa rétine, la sphère est
imprimée
dans le filet qui ne pèse pas.
Mais
l’adversaire, aussi
s’est allongé sur le vert
à l’heure précise.
Il a aussi lancé sa jambe
à l’heure précise.
Le
ballon s’arrête,
le cœur du public
est un vacarme atroce.
Le
joueur sent l’effervescence
de son élan.
L’adversaire ébauche
un sourire
perpendiculaire au vert.
Et
le ballon est une larme,
blanche et noire,
sur l’échiquier désolé.
ALEJANDRA
MENASSA DE LUCIA
École
de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedi 19h. Madrid
Coordonne:
Miguel Oscar Menassa
Madrid, 28-05-01
À LA SÉLECTION ESPAGNOLE DE FOOTBALL
Un
mathématique hasard de l’impossible
a décidé sa structure impaire:
onze pièces sur le vert échiquier.
Un numéro tatoué dans le dos,
un chiffre guidant ses pas
invisible, comme l’âme ou l’amour.
Dans le creux central de son
regard
transitent héros et demoiselles,
chants de sirènes abandonnées
dans le grenier de la vie.
Ils absorbent l’éclat de la
gloire,
ils rompent les limites de la chair
et traversent, avec une décision irrévocable,
l’impalpable anatomie du désir.
En accord avec l’impétuosité
nationale,
ils défendent l’honneur de
millions.
Dans leurs rêves ne vibre
qu’un nom de femme: Victoire.
CARMEN SALAMANCA GALLEGO
École
de Poésie Grupo
Atelier Samedi 19h. Madrid
Coordonne: Miguel Oscar
Menassa
J’ai
grandi sylvestre au milieu de l’océan.
L’air dorait ma peau et les colombes
réveillaient le ciel de leur vol.
Il fut nécessaire
de tomber une et mille fois
de croire à l’impossible
de feindre un horizon de couleurs.
Nécessaire
la douleur et la miséricorde
découvrir dans tes mains ouvertes
le vide, le néant.
Ta
silhouette naît dans mes yeux
femme à la taille légère,
peau foraine
étrangère sans nom,
Poésie.
CRUZ
GONZÁLEZ CARDEÑOSA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedi 17 h.
Madrid
Coordonne: Carmen
Salamanca
Gallego
Madrid, 30-05-01
À LA SÉLECTION ESPAGNOLE DE FOOTBALL
La
passion de l’Espagne dans la poitrine
de l’herbe humide sous les pieds,
une odeur d’histoire,
de longues années de sueur et de larmes
de reproches filés d’or et de peau.
Honneur
teinté de sang;
sang et argent se fondent
étreinte de gladiateurs
cirque
où la mort est pour le vaincu.
La
bataille commence:
retranchés au milieu du stade
les corsaires avancent vers l’horizon.
La
bête rugit, ses griffes déchireront
avec la subtilité d’un jeune époux amoureux
les habits de sa bien-aimée.
Ses
dents joueront du violon
tandis que le chien du berger
réunit le troupeau autour de la victoire.
Son
regard embue les yeux du monde
à travers les caméras.
Aujourd’hui
le fauve rugit plus fort
parce qu’il sait qu’aujourd’hui
il ne va pas mourir.
MAGDALENA
SALAMANCA GALLEGO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedi 17 h.
Madrid
Coordonne: Carmen Salamanca
Gallego
Madrid, 31-05-01
RETOUR À LA TRISTESSE
J’entre.
Permutation, après, des situations vitales.
Chaque fois qu’un homme se tait, un autre écoute
et les deux naissances deviennent impossibles.
Les
mêmes corps tombent chaque matin
mordant la pulpe cruelle de l’espérance,
vous êtes des tours mortelles, des arbres de l’âme
où les oiseaux annoncent leur suicide.
Le vent qui verdoie les temps
n’est jamais arrivé à toucher nos racines,
les rêves d’une éclipse restent en arrière,
du jardin dévoré par la nuit,
la fleur violée,
nos yeux perforés
comme le centre du néant.
Moins de lumière,
moins de chair de pain à chaque instant
pour nourrir les dieux impossibles.
Ces solitudes ne gisent pas ensemble,
elles ne connaissent aucun espace
inhabité
où amener aux funérailles notre
cri.
Après,
quiétude,
folie lancée
à la bouche brutale de la tristesse.
Chaque fois qu’un homme parle, un autre hurle.
AndrÉs
GonzÁlez Andino
École
de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedi 17h.
Madrid
Coordonne:
Carmen Salamanca Gallego