Madrid, 1-7-01

CÔTÉ OBSCUR DE LA NUIT

Je  marchais .
Je  voyageais au centre même d’un prisme de magnolias.
Dans les sables jetés au temps, elle, panthère sauvage,
elle était le mouvement absolu de l’être.
Les odeurs du charme la fascinent.
Ventre dansant des  rubis de frénésie.
Folle panthère ton heure est arrivée, tu boiras de la lune agitée,
le secret des amants et tu te souviendras de l’extension du vent.
Tu transporteras dans ta peau, la furie éternelle de la race,
marques ouvertes d’une nouvelle naissance.
Tu es la panthère dorée de la nuit,
ta voix est le scandale affolé du rossignol,
animal et minéral,
implacable jouissance de ton chant.

BETINA ALFIERI
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Mercredi 11,30 h. Buenos Aires
Coordonne: Lucía Serrano


Madrid, 2-7-01

 C’ÉTAIT LA NUIT DES MOUCHOIRS ROUGES

C´était la nuit des mouchoirs rouges
comme des lèvres qui frôlent le poison,
comme un crépuscule ardent
qui fait irruption,
sur le sable innombrable.

Quand je regardais au fond de tes yeux
je tombais, irrémédiablement, dans l’abîme
et il était impossible de te trouver ou de retourner...

C’était la mort avec ses mouchoirs rouges;
le sang emporté
le visage transi.

Maintenant je tremble,
il y a une frémissante palpitation dans le miroir
et une autre qui émule mon nom,
les arpèges brisés de ma voix.

PAULA MALUGANI
École de Poésie Grupo Cero 
Atelier Dimanche 19h. Ibiza
Coordonne: Emilio González Martínez


Madrid, 3-7-01

ESTHÉTIQUE OU L’INCONSCIENT NE SE REND PAS

Mon amour
je sens que je traverse
sans le savoir
un monde
inconnu à chaque pas.
Je désire te rencontrer dans
des scintillements ouverts de lumière,
d’insolente lumière,
de verte et d’indescriptible lumière.
Non-su permanent,
d’insistants battements
brament sur des nuages
tissés de nacre.
Je nomme le ténu
voile de cette pluie fine
sur tes yeux tristes
et, cependant,
je veux ce voyage
je parie une et mille fois
sur ce voyage
seulement pour te rencontrer.
Stupide vacarme
qui résonne en cadence
en gammes de bleu.
Esthétique de ce qui n’étant pas
cherche ce qui n’est pas.

JORGE MONTIRONI
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Mercredi 11,30 h. Buenos Aires
Coordonne: Lucía Serrano.


Madrid, 4-7-01

ENTRE LES HEURES

                                                            à Raúl 

Ami, à la hauteur de mes yeux,
tu t’étales en transparence.

J’écris parce que tu jouais avec les phrases,
tu aimais la musique plus que les sens.

Je n’ai pas mal aux mains en invoquant ton absence,
caillou de peaux tombées.

Solennité silencieuse entre les fleurs.
En elles j’officie des fondations inespérées,
des croyances, des signaux invisibles.

Avarice captive entre les heures.

JAIME ICHO KOZAK
École de Poésie Grupo Cero
Atelier  Dimanche 11h. Madrid
Coordonne: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 5-7-01

LE VOILE QUI NOUS  SÉPARE

Le voile tragique qui nous sépare
aveugles regards infinis.

Tissu  argenté,
qui scelle les lèvres
poussées,
compulsivememnt,
par des paroles insistantes.

Rideau déchiré,
par la douleur de joies passées.

Regards perdus.
Paroles perdues.
Joies perdues.
Lancées
par une puissante fissure
vers le trou noir de la nostalgie.

MARISA RODÉS PUEYO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du samedi à 17 h. Madrid
Coordonne: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 6-7-01

TOUT EN HAUT

Tout en haut d’un homme
sonne une note. D’aigres ardeurs
complètent  légèrement sa bouche.
Ne le maltraite plus jamais.

Nous avons toujours encerclé son ombre,
jaune obscurité
d’un regard malade, qui murmure encore,
voix du fond de mes mains.
Peut-être soutenir contre moi-même
ses délicates phrases, doit m’aider
pour parler d’autres jours.
Elle, elle me permet d’entrer
dans des lieux inexistants,
de nouvelles cimes habitées
par de futures malédictions.
Futur est l’instant
où nous levons la tête.
Autour, peu de chemins :
avoir abattu un caprice,
avoir changé
mille petites cordes
pour une chaîne de fer palpitante.

Des éclairs partaient de mes doigts,
lumineux vautours blessés,
conjugaisons mortes,
vers la paix totale.
Le chemin s’est dissout
dans des verres de cristal affligés
de leurs propres vertus.

KEPA RÍOS ALDAY
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du Samedi: 17 h. Madrid
Coordonne: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 7-7-01

VÊTEMENTS

Je ne veux plus changer d’habit.

J’ai regardé par cette fenêtre
           au coin cassé.
J’ai été rocher dévoré par les eaux
            et sable et poussière
            poussière et temps accumulé.

J’ai  fait des équilibres entre des lignes parallèles
             réconciliées à l’infini.

J’ai bâillé au rythme 
                          du bruit de la machine
                          et cachée parmi les feuilles mortes
                          j’ai transpiré des heures de rage
et depuis que mon corps s’est vêtu de tes mains
je ne veux plus changer d’habit.

RAQUEL FERNÁNDEZ DOMÍNGUEZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Dimanche 17 h. Alcalá de Henares
Coordonne: Carlos Fernández del Ganso

Madrid, 8-7-01

J’ÉTAIS MOUSSE, JE SUIS DEVENUE PIERRE

Arrive ce point du crépuscule
qui imbibe la peau.

 Le Déluge universel abrita 
Noé sous les seins d’Athénée
et ensemble ils regardèrent l’Olympe.

Une fine pluie d’or est tombée
de ce ciel surveillé par les dieux.
Cérès cultiva la mousse fraîche
de l’engendrement
et l’offrit à Achille
du don de la vitesse du vent.

Assis sur la pierre il  caresse
son talon,
 toute vie évanouie.

Fraîcheur de bouche prisonnière
par la loi des mots.
J’ai été mousse et maintenant pierre.

Débarrassée de la vie commune
je frappe à la porte du silence
pour que me parle la mémoire.

Pour que je t’aime depuis le langage,
depuis le vide de la parole,
et me remplisse de toi
à la tombée de la nuit.

MÓNICA LÓPEZ BORDÓN
École de Poésie Grupo Cero
Atelier  du dimanche à 17 h. Alcalá de Henares
Coordonne: Carlos Fernández del Ganso


Madrid, 9-7-01

SUR LA CORNICHE IRRÉVERSIBLE DU TEMPS

N’approchez pas,
laissez le vent libre
en cet automne délicat .

Laissez-le sourire à travers les feuilles,
colonnes qui s’étirent et s’ouvrent
en spirales d’infinie lumière dorée.

Des langues d’eau, des tentacules de mer
s’approchent, transparentes, vers les grandes cascades.
Prisme sanglant, balance de vie
qui, comme un chant invertébré, élève sa voix
sur cette plainte, sourde rumeur inabordable. 

Je ne pleurerai pas, face à la mer de cette peine noire.

Je verserai mes larmes
sur la corniche irréversible du temps.

Sur l’épaisse vapeur de l’aube,
je dessinerai la forme neutre du vide.
Là où la vérité impose sa lumière nue,
là où voler est ciel ouvert: vie.

Mª ROSA PUCHOL PÉREZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier  du samedi à 17 h. Madrid
Coordonne: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 10-07-01

ANGES II

Je cultive des nécessités.
Je dors dans le nombril
du rêve de l’Univers.

De petits morceaux de cristaux
lumineux, fondent
dans de volcaniques découragements.

Puissant cheval de feu
dévastant mon aridité!
Flamme ailée. Embrase-moi !

Vole-moi du coin secret
l’ensorcellement hébété

d’inutiles amulettes !

Emmène-moi loin.
Avale des entrailles
           le vent.

                                                                                    MÓNICA DELUCCIO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Mercredi 11,30 h. Buenos Aires
 
Coordonne: Lucía Serrano


Madrid, 11-07-01

VAINCUE

Ta bouche se brouille,
tu enterres le regard,
tu restes à l’abri de la nuit,
tu fuis où la mort te révolte.

Tu cherches du salut de la Terre
-au lieu du dur accommodement-
l’amour qui transfigure les plans.

Alors je t’aime,
sans portes où tu arrives,
loin des baisers connus,
sans un laboratoire de jours heureux,
étoile plus dissoute qu’éteinte.

SERGIO APARICIO ERROZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du dimanche 17h. Alcalá de Henares
Coordonne: Carlos Fernández del Ganso


Madrid, 12-07-01

PAR LE SEXE

Par la candide frayeur des amants
par cette clameur populaire
tellement autre et tellement intérieur.

Secrètes ténèbres de ce qui est mis de côté
et la saveur d’une harmonie monstrueuse
comme des vaisseaux ou de sauvages créatures mythologiques.

Le gémissement profond de la propre terre à coups de bâtons
dans l’ombre de ce qui ne se voit pas mais qui sait.

La lucide campagne de ce que nous n’adorerions jamais
et que nous aimons encore.

Caléidoscope saturé où
tout tourne sans trouver exactement sa place.

Ou des harmonies arrachées à ce qui est trop vaste
frôlent des silences immergés dans les mots.

C’est le soleil torride sur l’opacité des choses intérieures
impénétrable bleu d’un ciel sous l’élan de ce qui n’est pas.

Retour quotidien du non-sens, cantique de l’éclatement.

ELEONORA D'ALVIA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Mercredi 11,30 h. Buenos Aires
Coordonne: Lucía Serrano


Madrid, 13-07-01

ASSIS, VOYANT PASSER LE DIMANCHE

Assis, en regardant passer le dimanche,
je décide parfois d’écrire et de vivre.
Enveloppé dans un tourbillon de sentiments,
de pensées et de mouvements de vie,
doutant, vivant, courant sans arrêt à un rythme accéléré,
et les tièdes couleurs nébuleuses, emmêlées comme la vie,

un an après l’autre, souvenirs, expériences vécues, mes amours et mes filles,
je suis là produisant ma vie,
parfois je veux trouver un temps pour les extrêmes,
sans déranger, sans qu’on me dérange,
sans pouvoir et pouvant avec les autres,
le travail, quelques projets, 
quelques moments magiques, profonds,
la réalité, la terre, les enfants conduits à la mort,
par l’indépendance, par la religion,
indifférents à tout et en premier lieu,
les enfants morts.

ANTONIO MENASSA MERLINI
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedi 19h. Madrid.
Coordonne: Miguel Oscar Menassa.


Madrid, 14-07-01

AUJOURD’HUI LA VIEILLESSE M’A ENVAHIE

Quand j’étais jeune
j’écrivais à mes moments libres, 
je croyais que la vie était éternelle
éternels nos corps invisibles
éternel le mensonge,
toi, éternel, amant passionné de mes sexes.

La demeure de Dieu
était infinie,
ses plans ultimes, parfaits
cette charnelle apologie qu’est l’homme.

Aujourd’hui la vieillesse m’a envahie,
aujourd’hui je ferai miens les pleurs et la tristesse jusqu’à six heures,
exactement jusqu’à six heures du soir
heure où le soleil
rappelle à la planète l’univers.

CLAUDIA GARCÍA ASTORGA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Mercredi 11,30 h. Buenos Aires
Coordonne: Lucía Serrano


Madrid, 15-07-01

CHEVAUCHANT DES LIMITES

Des chants de moineaux affamés
me réveillent le matin.
Je ne sais pas qui je suis, mais je suis vivant. Tu me comprends?
Je suis vivant, mais cela n’est pas suffisant.

J’écris des traces emmêlées dans nos corps,
oubliées derrière les grilles pressenties
qui ne laissnet pas échapper les ombres de l’adieu.

Rappelle-toi, cette nuit nous avons fait l’amour,
et la lune enviait notre chant,
doux glissement dans le va-et-vient des heures.

Les crépuscules brisent leur lumière pour nous abriter.
L’espace nous réuni et nous sépare.
Maintenant la distance est incertaine,
ici, à tes côtés, à l’arrivée sempiternelle, je te parle.

Je me laisse glisser, univers de paroles,
nous sommes des condors dansant dans le ciel,
énormes oiseaux sillonnant les abimes, nous sommes,
chevauchant des limites, la sauvage pulsation du temps.

ISMAEL RIVERA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedi à 17 hs. Madrid
Coordonne: Carmen  Salamanca Gallego


Madrid, 16-07-01

CE QUI A LIEU

Je suis ce qui a lieu
dans tes jours,
au-delà de l’aube,
après ton nom,
 
une partie de ta lumière.

TERESA POY
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du dimanche à 11 hs. Madrid
Coordonne: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 17-07-01

UNE FEMME 

Une femme est plus qu’une femme,
c’est le lieu où la main caresse un dos,
le poing serré par la douleur de naître,
l’instant de la larme.

Une femme vit dans la femme,
assise sur la froide pierre de la nuit,
cherchant quelqu’un à aimer,
femme nue à l’aube naissante.

Une femmme est plus qu’une mère,
la supplique qui brise la haine,
moment éternel de ce qui fuit,
solide appel de ce qui revient toujours.

Une femme se défait au milieu de désirs
et elle s’en va en peignant son chemin
avec des souvenirs qui parlent.

FRANCISCO MANUEL GARCÍA PALANCAR
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedi à 17 hs. Madrid
  Coordonne: Carmen  Salamanca Gallego


Madrid, 18-07-01

LES MONSTRES DE LA RAISON

Tant de fois j'ai voulu
te tuer ou mourir.
Aujourd'hui je suis apocalyptique,
je sens la fin comme une proie
et cela m'affole.
La puanteur du sang
peuplant les artères.

Cette nuit la lune
a mis la lueur
des loups dans mon regard,
un abîme rouge comme
les précipices de la chair
et des dents comme des griffes,
des gencives habitées par la haine.

Cette nuit est un cimetière
où enterrer la solitude.
Il n'y aura pas d'autre érection
que celle des pendus,
ni d'autre banquet
que celui des larves.
Quand le ver baise
le ventre des morts
il le fait avec une passion
indescriptible.
Le cœur m'a abandonné,
son rythme frénétique
de volée.
Et je vais dans les recoins
demandant, à tue-tête
une âme pour me jeter aux épaules
de l'oubli.

Cette odeur de finale, cette odeur
me rend folle,
me pousse à commettre
atroce crime.
Cette page, cette page
en blanc est morte
entre mes mains.
Princesse de la nuit,
ma pomme perdue
habite dans ses ténèbres.

ALEJANDRA MENASSA DE LUCIA
École de Poesía Grupo Cero
Atelier Samedi 19 h. Madrid
Coordonne: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 19-07-01

ROUTE VERS LES ÉTOILES

Je vide de présences mon équipage
j’allége d’inquiètes révoltes
épidémies tronquées de l’âme
endormie dans les sous-sol de l’amour.

 J’abandonne des ulcères d’épouvante convenue,
de cassantes raisons, peau au dedans
et l’usure d’un final supposé.

Sur la marge des jours
habitent des échos d’une minime espérance,
des gorges soumises au marché noir
équilibre de fer de passion.

Hantise noircie entre les dents
hybride armure définie par des siècles
sur la quenouille fanée du destin.

 Je divise avec habileté le résultat:
ailes de carton pour le souvenir,
ambre de lumière entre mes mains.

 

CARMEN SALAMANCA GALLEGO
École de Poesía Grupo Cero
Atelier Samedi 19 h. Madrid
Coordonne: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 20-07-01

POUR APAISER LA FAIM

Pour apaiser la faim

j’ai mangé la partie aride des montagnes

j’ai forcé le coeur obscur de l’aube

comme une trace brisée.

 

Le monde se réveille entre mes doigts

un vieux monde remue comme un  corps

qui ne veut pas s’étendre pour toujours  sans être mort.

 

Il n’est pas possible d’être jeune ou vieux

sans avoir compris quelque chose de la vie.

Un respect envers l’autre, un amour

une larme sous les draps.

 

Dans tous les cas ne pas cesser de dire

même si la furie n’est que vent et que les mains

se brisent en un frisson d’éternité.

 

La faim n’est pas seulement  de la terre transplantée

ce sont les fleurs que j’arrose chaque jour

et les nuits que je suis sur le point de construire.

 

Pour apaiser la faim

un livre, un baiser, une larme ne seront pas suffisants.

Il faudra la mer et les sourires

des mains amies et quelques rêves

plus d’un amour et quelque brisement

et, surtout, de la poésie.

CRUZ GONZÁLEZ CARDEÑOSA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedi à 17 hs. Madrid
Coordonne: Carmen  Salamanca Gallego


Selección de Poemas Inéditos

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