Madrid, 3-12-01

D’UN SEUL COUP

J’ai été la pierre qui a frappé ses corps effrayés,
et j’ai été la main qui a lancé la pierre.

J’ai été la pupille tremblante qui savait de la mort sa chanson,
et j’ai été la peau trouée brûlant sur le sable.
Vous ne me connaissez pas?

Je suis le droit de tuer qui invente des drapeaux,
je suis le gouvernant qui mange la terre,
je suis la force pour la force
Vous ne me connaissez pas?

Je serai la faim,
je serai la pauvreté,
je serai la guerre.

HERNÁN KOZAK CINO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h. Madrid
Coordonne: Carmen Salamanca


Madrid, 4-12-01

TEMPS

Je suis confus, les pieds figés.
À côté de moi la mort.

Je perds à chaque pas une raison :
je trouve encore des mots
qui empêchent mon départ;
d’autres tombent sans pitié
dans les griffes de la logique,
comme des cavaliers montés sur la prémisse.

Je frémis,
j’obéis à ton regard
et cependant,
j’apporte pour toi la vérité.

MANUEL MENASSA DE LUCIA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17.30 Madrid.
Coordonne: Alejandra Menassa de Lucia


Madrid, 5-12-01

J’AIME CETTE BOMBE 
QUI EST TOMBÉE DANS MES BRAS

Cette bombe qui est devenue muette dans mes bras
clame une route vers un destin humain,
grandiose et éloquent le sang
suit les lois du condamné à mort.
Candide immersion sous les draps
parmi des vérités errantes
parmi ces vagins incolores
sans nom qui mette des contours
à ta main s’éloignant parmi d’autres mains.

Cette bombe qui est tombée dans mes bras
a brisé pour toujours la prochaine étreinte
a séparé mon corps en ses fragments
a semé la haine dans cette cicatrice
qui fuit avec la nostalgie dans la rue vide
dans les virages d’une guerre
qui n’a jamais commencé.
Et ça c’était la guerre
mes yeux morts
te regardant
jusqu’à demain
où ce sera un autre
qui répandra
son silence et ses viscères.
Nœud brisé
sourire effacé,
lèvres absentes
du baiser
qui oublié
ne voit pas le jour
sur tes chairs macérées
par la mitraille et le formol.

AMELIA DÍEZ CUESTA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis: 19hrs. Madrid
Coordonne: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 7-12-01

QUE CHERCHES-TU GRAND-MÈRE?

A Rocío

Si je cherche quelque chose c’est un morceau de soleil
une épingle à nourrice seulement pour son nom
quelque chose que peu d’entre nous perçoivent.
Quelque chose à quoi je ne doive pas dire adieu.
Un mot ancré dans la terre humide
un insecte sans besoin ni occasion,
des aboiements de notre fidèle ami
lâchés en l’air quand il essaie sa voix
Quelque chose de la joie qui habite ton âme
recréant dans tes yeux des étincelles d’amour.
Quelque chose de la perfidie actuelle détruite.

Ton corps se balançant dans la musique
invoquant le vent.
C’est la surprise et aussi le miracle
ce qui concevait et devait exister.
Des papiers
de toutes les tailles et de toutes les couleurs
couvrant comme de la peau
ma propre peau
-Caïmans qui s’étranglent de tant ouvrir la bouche
chairs d’aurore embaumée
sauriens du passé mourant sans désirer 
convoquant seulement leur propre fin-
De la fatigue d’une recherche interminable
de laquelle nous pouvons aussi parler….

Étendons simplement cette tiède étreinte
tes pas et les miens
marquant un sentier
introuvable.

Nous savons de la solitude
et de la main amicale.
Tes pieds ailés
ton regard de nymphe pleine d’assurance dans la forêt
- les yeux sérieux et paisibles-
où l’audace ne vieillit pas
n’apaise ni ne danse
bien qu’elle assure tes jambes sur la pointe des pieds.

MARÍA CHÉVEZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier dimanche: 11 h.
Coordonne: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 10-12-01

POUR NAÎTRE EN MOURANT

Étonné dans un personnage de fiction
je m’empare dans le maniement centré et clair
d’un recommencement rempli d’idées.
Je me rappelle les incorruptibles bêtes surgies des eaux            
récupérées dans des descriptions concises et détériorées.
Sans me défendre j’invente une variation en léopard
une indication passée et fréquente qui mue en jaune.                  
J’avance avec les heures en ouvrant des cachettes de vers luisants

vers l’escalier où se déplie ce faux pas
qui trace des lignes antérieures et un élément manipule
une chanson qui chancelle effrayante avec des têtes obsessives
et des parallélismes soupçonneux dans un jeu réflexif.
Une satire secrète se détache parmi les aventures et les élevages
qui immortalise les morts
pendant que les miracles distrayants des vivants
descendent comme des masses rétrécies vers la vanité
qu’un amour en uniforme de tempête de neige colore sur         
des chagrins calcaires et des exaltations de tourbillon.
Sur des ruines rigoureuses je transmue en armée valeureuse
et près du temple de désordre je mélange des jus
près de prudents artisans qui dessinent mes cercueils.
Et pendant huit siècles mille vierges de latex s’arracheront leur sang
alors que quinze mille familles réduites et déchues
se disputeront à coup de poing les miettes du passé.
Silencieux sur mon esplanade,
les pupilles injectées dans des monstres                         
j’allume de puissants projecteurs sur l’apparence de la rue
pour que la brume montre son vide symétrique sur des trottoirs trébuchés.
Je rêve de sacrilèges comme des pas menus de rats fouineurs
prenant de l’eau bénite du fauteuil domestique du curé.
La terre se tait sur des pages abandonnées comme des cyprès sur une paupière.        
Sur un de ses angles mon personnage s’étire sur le XXI siècle.
Avec les mains finement attachées je presse des citrons d’allégresse
pendant qu’un silence m’écrit à côté de bêlements de tonnerres
et près d’elle je me rends à ses raisons pour naître en mourant.             

 

FERNANDO ÁMEZ MIÑA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier: Samedi: 17 h.
Coordonne: Carmen Salamanca


Madrid, 11-12-01

POÈME

Sa douce terre fut si légère que tous les ans
et tous les jours de tous les ans nous faisons
des cœurs de pétales, nous actionnons le moulin à paroles et         
nous n’arrivons pas à te voir au-delà, dans le temps.
Un homme est sa forme et la forme qu’il a projeté dans les amours,
tempête du miroir où le mot nous rend en vers               
la peau des choses.
Je suis cette ombre, ma forme dans ce monde la porte des pieds.
Mystère halluciné dévêtu tumulte en ardeurs de paix.

STELLA CINO NÚÑEZ
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du dimanche à 11
Coordonne: Miguel Oscar Menassa  


Madrid, 12-12-01

CALME DU MONDE

Je deviens végétal
sur les rives du temps.
Logée dans mon corps,
tu demeures,
muette
de rendez-vous et de villes.
Les douleurs étrangères m’obligent,
baisers promis
de la rencontre.

LIDIA ANDINO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Dimanches 11 h. Madrid
Coordonne: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 13-12-01

POÈME À MELILLA

Mer baignée par la douce peau de Melilla,
des oiseaux qui, d’un chant cadencé,
réveillent mon vivre.             
Melilla, tu résonnes dans ma gorge
avec ton arôme profond,
tu marques le rythme de mes jours.

Lente marche parmi tes rues,
tes gens et tes joies.

Voisine d’autres mondes, 
tu vis entre l’amour et le feu,
oraisons à l‘aube.

Distance brisée par les vers.
Vol sans rives.

HELENA TRUJILLO LUQUE
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 18h. Málaga
Coordonne: Amelia Díez Cuesta
 


Madrid, 14-12-01

D’UN SEUL COUP

Certain.
Un seul coup glissant sur ta peau
cette soif de rien
pure innocence qui se détachait
spirale de baisers.                                                 
Ton amour était une épée dure
un solo de violon parmi les feuilles de papier
un silence encerclé près des chrysanthèmes.
La nuit immense s’appropriait de moi                 
étirant comme elle pouvait les heures lointaines      
où je cherchais à t’aimer, par quelque fente             
sur une ligne, parfois, sur un point à la ligne.
Et maintenant je le sais.
Un seul coup glissant sur ta peau
larmes de mercure
étrange paradis que celui de cette douleur  on  pourrait peut-être
tressant ton silence.

PAOLA DUCHÊN REYNAGA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du samedi à 19h
Coordonne: Miguel Oscar Menassa
Atelier du samedi à 17h
Coordonne: Carmen Salamanca


Madrid, 17-12-01

C’ÉTAIT

Sous le jeune laurier du jardin où se promenait le poète
tu maudissais le moment
désert sans voix.

Et la lamentation, cristal;
la nostalgie, tempête.  

La douleur devenait vent violent entre mes mains.

Par la fenêtre, la lumière du matin cachait tes misères,
chaînon brisé pour un futur incertain.

MONTSERRAT ROVIRA
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Dimanches: 19h Ibiza
Coordonne: Emilio González Martínez.


Madrid, 18-12-01

TOUTE LA VIE J’AI DU FAIRE MA VALISE

Et la défaire sans savoir
quel était le temps de chaque chose.
Je me perds sur les voies
qui marquent mon voyage.
Je confonds les gares et la destination.
Je reste assise
sur ce banc froid,
seule sur le chemin,
sans retour.
Une amertume sur les lèvres
s’égrène en miel.
Ma bouche ouverte cherche dans le souvenir
ta bouche qui revient.
J’ai confondu les gares,
les vêtements ne m’ont pas servi:
un manteau m’a fait défaut en hiver
et il a été de trop en été.
Toute la vie j’ai dû
faire une valise,
si je n’ai pas su pour moi
Comment allais-je préparer tes bagages?  

ANGELA CASCINI
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Vendredi à 11.30 h
Coordonne: Norma Menassa


Madrid, 19-12-01

DE SABLE ET DE SOLEIL

Pour Hernán Kozak

Le soleil pleut
sur le désert
ses rayons
chauffent
les doigts invisibles.
Il y a des yeux
immenses
qui contemplent
la mort d’un passé,
les jours à venir
parleront de notre gloire.  

PILAR NOUVILAS LARRAD
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du Samedi à 17h
Coordonne: Carmen Salamanca Gallego 


Madrid, 20-12-01

JAMAIS RÉFLÉCHIE DANS LES MIROIRS

Viens avec ta nuque d’infidèle
avec ton coup de pierre.
Carilda Oliver Labra

Moi je t’attendais comme on attend
la chute de feuilles en automne,
la quiétude qui précède la tempête,
cette infime partie de moi
sur l’herbe.

Moi je t’attendais encore
dans l’horizon ardent du crépuscule,
intime lumière,
partie tombée en arrière.

Et le malheur de n’être
que l’ombre infidèle
jamais réfléchie dans les miroirs.

ALEJANDRA MADORMO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Vendredi 11,30 h. Buenos Aires
Coordonne: Norma Menassa  


Madrid, 21-12-01

IL Y A DES JOURS

Il y a des jours où je me perds
avec mon nuage
dans de sordides ruelles,
dans des demeures d’hiver,
et je m’éteins lentement;
et je m’arrête presque…..
Il y a des jours où je me réveille
au point mort
et je peins en grisaille des toiles d’araignées.     
Avec les lèvres scellées,
la nuit se déchire de silence.

PAULA MALUGANI
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Dimanches 19h Ibiza
Coordonne: Emilio Gonzalez.


Madrid, 24-12-01

PACTES

Roche céleste
Indemne, pure
granitique trace du sud.
Soleil resplendissant,
les sillons de ton regard brillent
au vent du nord.
Tu agrandis l’horizon d’est à ouest
et sur toutes les latitudes
tu fais un pacte avec l’indestructible
de l’Homme.
Je ne veux pas une infinité d‘âmes
brûlant en ta présence,
ni un monde qui, résigné,
aplatit l’inaptitude des vampires
qu’ils ne connaissent pas.
Je veux vivre pour t’écouter
Je veux vivre! et trouver
dans ce geste un monde ouvert,
ouvert comme la chair au soleil,
qui saigne dans les batailles
combattues sans défaites.
Et tomber, si c’est nécessaire
debout, de façon grandiose.

JORGE MONTIRONI
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Mercredis 11h30h. Buenos Aires
Coordonne: Lucía Serrano.


Madrid, 26-12-01

LE JOUR DE L’EAU

Tous les jours sont le jour de l’homme
et il n’existe pas de temps sans océans.
Sans eux l’avenir n’a pas d’avenir,
c’est l’histoire documentée des générations.

Depuis les gueules de l’océan 
tous les peuples vivent de l’eau.
Tous les jours dans des lacs obscurs, de larges fleuves,
n’importe où et à n’importe quelle heure,
on trouve un chemin, un sens, une bonté.     

Les muets sont là aussi,
condamnés de la terre
ignorés de l’eau,
exclus de langage.  

Nous vivons dans de grands océans dans lesquels flottent
de petites îles qui s’appellent elles-mêmes : le monde.
Des fragments de terre au milieu de l’eau
des profondeurs escarpées.
Notre corps,
atomique d’instants nocturnes
récurrent d’infini,
étranger à tout sens décroissant au vent,
apparaît et le temps se retire.

JAIME ICHO KOZAK
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du dimanche à 11h
Coordonne: Miguel Oscar Menassa


Madrid, 27-12-01

LA CORNICHE IRRÉVERSIBLE DU TEMPS

 Des fragments luminescents
                                   de temps
glissent sur l’histoire
                        entre ses fissures.
Des murs infranchissables
                                    de silence
légers voiles de gaze
                                    ondulants
dansent entre les doigts
                                    serpentants
comme des rideaux de temps.

Impassible aveugle
il ne semble regarder
que vers l’avant.

Le temps :
            irréversible corniche brisée.

MARISA RODÉS PUEYO
École de Poésie Grupo Cero
Atelier Samedis 17h Madrid.
Coordonne: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 28-12-01

ILS OUVRIRENT LES COUTEAUX

De leurs couteaux aiguisés se détachait
à mesure qu’ils apparaissaient,
ce présage caractéristique
d’ancienne signification encore intacte.
Ils vivaient comme dans une forêt
sous les arbres,
cachés parmi les rochers,
préparant de magiques talismans
et des onguents contre l’invasion.
La forme des pieds sur le terrain,
sur le froid des rivières,
sur l’ardeur de la chimie
qui émane du sous-sol
où vit, traqué
par toutes les lumières extérieures,
l’animal vorace de la charogne.

Un jour la peur sortit de l’épaisseur
comme un serpent venimeux.
Immense et verte, son ombre céda
aux caprices de l’investigation.
De la torche humaine gouttèrent
les larmes des fidèles
qui mettaient au loin le feu
aux arbres et aux pierres tombales cachées, au chanvre,
à la fraîcheur de déluge et de moisissure,
aux bois et aux ceps,
au calme et à la douleur
de la maladie, au repos,
à la mort solitaire,
au sordide lucide de la vie.

KEPA RÍOS ALDAY
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du Samedi: 17 h. Madrid
Coordonne: Carmen Salamanca Gallego


Madrid, 31-12-01

CINQUANTE-CINQ
VINGT- DEUX

Le matin tu descends du tableau,
peu t’importe de descendre parée
de vêtements anciens,
d’histoires romantiques
du délire d’être unique,
d’existence éphémère.

Tu traverses la rue,
avec pour canne ton ombrelle,
tu regardes des deux côtés
comme pour arrêter le monde
et très droite, regardant droit devant toi
tu arrives à l’autre rive.  

La porte se ferme derrière toi.
Il n’y a de retour à rien.
Il y a de longs couloirs,
d’innombrables passages secrets,
labyrinthe cosmique,
mystère de la vie :
Amour et mort.

OLGA DE LUCIA VICENTE
École de Poésie Grupo Cero
Atelier du Samedi à 19h
Coordonne : Miguel Oscar Menassa


Selección de Poemas Inéditos

index